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Chapitre 4. Le Happy End

Dernière étape, la décisive. Pierre s’engageait sur la ligne de départ en baie de Morlaix avec 1h53 d’avance sur le deuxième au classement général. Un matelas confortable qui n’était pourtant pas suffisant pour le méditerranéen au vu de l’épreuve qui l’attendait. « Cette étape va être imprévisible. Elle s’annonce dure, aléatoire et longue, pas forcément idéale pour moi qui suis devant » disait-il à l’aube du grand départ à Roscoff. Simple à raconter sur le papier, un aller-retour au Fastnet, ce parcours de 685 milles s’annonçait pourtant très musclé, notamment sur la dernière portion jusqu’à Saint-Nazaire, risquant de creuser de grands écarts latéraux. L’objectif du leader était de se positionner en tête flotte au Fastnet afin de maintenir l’écart nécessaire sur ses concurrents pour sauver son classement général. Et c’est un contrat rempli et signé avec succès ! Arrivé 9e de l’étape, Pierre Quiroga est entré dans la légende en franchissant la ligne 1h05 après Xavier Macaire, et en gardant fièrement pour lui les 48 minutes suffisantes pour devenir vainqueur de la solitaire du Figaro 2021.


©️ Alexis Courcoux


« Avec 1h53 d’avance sur Xavier Macaire au départ de la 4e étape, j’enfonçais le clou ! Première mauvaise nouvelle, les fichiers météo que l’on avait nous annonçaient une foire comme on en avait rarement vu sur la Solitaire. Petit coup de chaud pour un leader qui espérait, comme les cyclistes, vivre une dernière étape dans le peloton sans qu’il ne lui arrive rien. J’avais d’ailleurs la pression de mes concurrents qui me soutenaient qu’ils n’enviaient pas ma place. La récupération plus courte qu’à la 3e étape a été bénéfique puisqu’elle ne m’a pas laissé le temps de réfléchir. Il fallait récupérer, point. Je me forçais à me dire que que ce n’était pas gagné, mais que je pouvais quand même atteindre la victoire ! »

L’appel à un ami

« Mes ressources internes étaient insuffisantes, j’ai donc fait appel à un ami ! J’ai demandé à mon routeur Dominic Vittet et à mon coach que j’ai rencontré cette année Tanguy Le Glatin des conseils et du soutien. Je n’arrivais plus à retrouver la simplicité de réflexion que j’avais un mois auparavant. Tanguy m’a posé la bonne question : « tu préfères perdre en étant en accord avec toi-même ou gagner en dénaturant ta navigation » ? Ces mots m’ont fait tilt, je voulais que l’histoire soit magnifique jusqu’au bout et gagner à ma façon. »

Une volonté à toute épreuve

« Dès le départ de l’étape, je suis un winner. Je barre, je barre, je barre et je me prive de confort pour faire avancer le bateau. Ça fonctionne puisque je réalise une super arrivée au Fastnet en limitant les risques. Je voulais passer, comme Tom Dolan, à l’intérieur des Scilly, Dominic m’avait d’ailleurs supplié de le faire mais au dernier moment, je me rétracte par peur de perdre mon classement général. Ça m’a tracassé mais j’avais déjà pris des risques avant et ça n’était plus raisonnable de le faire si près du but. »

La trêve d’anniversaire

« Je restais quand même complètement dans le match jusqu’au passage de front et de dépression après le Fastnet. J’arrive, au petit matin, à faire la différence dans la pétole en remontant en tête au classement, le jour de mon anniversaire ! - Je faisais le même coup l’année dernière devant Yann Elies à l’ile de Batz, c’est un super souvenir. – Ce jour-là, on fait tous une trêve dans cette bataille de fou, les concurrents me souhaitent mon anniversaire à la VHF, j’arrive enfin à prendre du temps pour moi, c’était une journée de bonheur ! »

Mode défense activé

« Toujours en tête, j’ai malheureusement changé ma stratégie en passant du mode attaquant au mode défenseur. J’avais la volonté de passer très au large de la Bretagne pour rejoindre la bouée SN1, Tom Laperche qui était derrière moi dans l’axe m’a conforté dans cette idée. Nous avons perdu quelques milles, je ne savais pas que Xavier (Macaire) allait attaquer à terre, je ne le voyais pas. Les conditions sont devenues exceptionnelles pour son groupe et moins bonnes pour le nôtre au large, ça a rendu la fin de course très stressante mais toute aussi belle car elle remettait en cause la victoire au général jusqu’à SN1. J’étais passé en mode cheval de course à essayer de gratter mètre par mètre de l’avance, c’était d’ailleurs la première fois que je distançais Tom, un des figariste les plus rapides du circuit, sur une portion de parcours. J’étais à fond, concentré jusqu’à la ligne d’arrivée. »

Une arrivée décisive

« Je franchis finalement 9e la ligne d’arrivée. À partir du moment où je ne gagnais pas, seul le classement général m’importait. J’étais très content, symboliquement, qu’Erwan arrive juste devant moi sur la dernière étape parce qu’il a contribué à ma victoire. Vient maintenant le moment de gêne où tous les bateaux accompagnateurs s’approchent de moi, je ne sais pas depuis quand Xavier a passé la ligne, ni si j’ai gagné ou si je dois lever les bras… Puis un zodiac me crie « c’est bon », et j’ai compris. Ce qui était cocasse, c’est que je ne voyais pas la ligne à franchir ! C’était la première arrivée de nuit sur la Solitaire, j’ai eu le droit à un live avec des gros projecteurs qui éclairaient mon bateau de derrière et qui m’empêchaient de voir à l’avant, je cherchais la ligne, ébloui et sous spi donc sans trop de visibilité. J’ai finalement trouvé cette ligne au moment-même où je la passais. J’ai fait, un peu à la footballeur, un cri de joie et tout s’est enchaîné très vite. Gauthier (Thomas), mon préparateur, est monté à bord, on s’est pris dans les bras et ouvert une bière. Je dirais que je me suis accordé seulement 5 à 10 secondes pour être sur mon petit nuage avant de reconnecter avec l’instant présent et d’enchainer les interviews. »

Les clés de la réussite

« J’ai été guidé par le bon nuage, l’alignement des planètes dont chaque vainqueur parle ! Je n’ai pas tout maîtrisé, j’ai donné le maximum pour que ça se passe bien et ça a marché ! Cette victoire était incroyable, l’équipe était incroyable, la course, mes résultats et le plateau aussi. J’y croyais à ce « happy end » mais les autres non, c’est pour ça que je répète sans cesse que cette Solitaire du Figaro était incroyable. Elle restera dans mon cœur pour un long moment. »

Ce dernier chapitre signe la fin de récit du vainqueur de la Solitaire du Figaro 2021. Cette histoire exceptionnelle et magique est la sienne, et s'il pense ne jamais l'oublier, la course des légendes ne l'oubliera jamais non plus !

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